samedi 3 novembre 2007

Le développement durable est-il compatible avec le néo-libéralisme de Nicolas Sarkozy?


Sincèrement, il est difficile de croire que la grande messe du GRENELLE de l’ENVIRONNEMENT, organisée par le gouvernement de Nicolas Sarkozy puisse aboutir à des actions concrètes. Soulignons tous d’abord l’origine d’un tel engagement : les sondages et le lobbying de Nicolas Hulot pendant la campagne électorale. Dès lors, faisons appel à notre mémoire quant à la façon d’agir, en la matière, des gouvernements de droite française au plan local, régional et national; l’avenir du Grenelle de l’environnement semble plutôt être dans le brouillard ! En effet, cette conversion rapide à l’écologie ne peut nous faire oublier leur alliance historique avec le monde agricole conservateur, la FNSEA ou encore d’autres lobbyings opposés à la protection de l’environnement… Le constat de la dégradation des écosystèmes sur le territoire français est en lui-même une piqûre de rappel ! L’agro-industrie a toujours bénéficié de subventions et de la protection d’Etat sans se soucier réellement de la dégradation de l’environnement. Les combats écologiques ont toujours été réprimés et les écologistes traités avec sarcasme.

M. Sarkozy et son gouvernement sont en contradiction avec l’initiative du Grenelle par le fait même que l’environnement ne puisse être une démarche isolée. Il est nécessaire de l’appréhender par le biais d’une vision systémique du développement se fondant sur la recherche d’intégration et de mise en cohérence de politiques sectorielles. Ceci impose un traitement conjoint des effets économiques, sociaux et environnementaux de toute politique ou action humaine. En ce sens le développement durable est incompatible avec le néolibéralisme prôné par le gouvernement de Sarkozy.

Rappelons quelques principes du développement durable selon le Sommet de la Terre réalisé en 1992 à Rio :

Le développement durable se veut un processus de développement qui concilie l'écologique, l'économique et le social et établit un cercle vertueux entre ces trois pôles :
C'est un développement, économiquement efficace, socialement équitable et écologiquement soutenable.

Cela signifie que le développement durable repose en réalité sur une nouvelle forme de gouvernance, où la mobilisation et la participation de tous les acteurs de la société civile aux processus de décision doivent prendre le pas sur le simple échange d’informations. Le développement durable entend promouvoir la démocratie participative et rénover l'approche citoyenne. L'accès à l'information, et la transparence en sont des pré-requis.

Croyez-vous que ces principes soient compatibles avec un gouvernement de droite ?

Pour mettre en place ces promesses il faut élaborer une vraie stratégie afin de créer des instruments efficaces pour les besoins du développement, pour lutter contre la pauvreté tout en conciliant ce qui est, pour la droite, inconciliable: croissance économique, respect des écosystèmes, protection environnementale et sociale assurant un avenir pour la France et l’humanité.
Posons-nous cette simple question : Combien de villes de droite on mis en pratique l’agenda 21 ?
Un bref rappel :
Les Etats présents au SOMMET DE LA TERRE à Rio, 1992 ont également adopté Action 21. Communément appelé l’Agenda 21. Dans le chapitre 28 du document, les collectivités locales sont invitées à établir leur propre programme de développement durable, car de nombreux problèmes doivent être résolus à l’échelle locale. Les actions peuvent être menées à court terme autant qu’à long terme, et considérer à la fois l'efficacité économique, l'équité sociale et la préservation de l'environnement.
La droite préfère le traitement des pollutions à leur prévention par exemple. C’est seulement lors des catastrophes sociales, économiques et environnementales que se révèlent des « humanistes » gouvernants qui proposent à ce moment des conventions en fonction de leurs propres intérêts. Mais l’application des conventions et les engagements pris sont toujours retardés… Lisez les mesures issues du Grenelle de l’environnement proposé par le monde associatif français, par les ONGs engagées dans ces combats de longue date : Le gouvernement Sarkozy s’engage timidement mais … dans 10 ans, dans 15 ans, dans 20 ans etc. L’absence d’objectifs clairs et chiffrés pour l’immédiat est flagrante!

Qui peut oublier le Sommet de la Terre, la fameuse Conférence Eco 92 réalisée à Rio de Janeiro ? Une occasion historique de « mea culpa » : plus de 170 Chefs d’Etats et représentants gouvernementaux y ont fait acte de contrition en public, reconnaissant l’échec de la croissance, qui contribue à épuiser les richesses planétaires sans aucune préoccupation de la survie des millions d’êtres humains abandonnés à leur sort.

Quel est le constat aujourd’hui ?

Malgré d’innombrables conventions internationales (plus de 500 conventions se sont tenues depuis la création de l’ONU), préparées par de nombreuses conférences internationales de développement, l’espace Onusien fonctionne malheureusement encore selon le schéma traditionnel : Les pays du Nord proposent et ceux du Sud réagissent.
Les pays riches ont imposé durant tout le XXe siècle, des stratégies de développement qui ont non seulement pillé et dégradé l’environnement mais aussi détruit les relations sociales, sans prendre en considération ni la spécificité culturelle ni les modus vivendi locaux. Les inégalités sociales, l’augmentation de la misère, les différences de pouvoir d’achat entre les pays, la dégradation des écosystèmes ruraux et urbains sont les indicateurs de l’échec du modèle occidental de développement.
Depuis 15 ans le Sommet de la Terre a sanctionné le système, mais il n’a pas permis la rupture avec les modes de production et de répartition des richesses.

Avec le Président Sarkozy, le Grenelle de l’environnement a été de fait plutôt une tribune lui permettant de paraître à côté d’un prix Nobel et d’attirer la presse américaine et européenne. Pour les écolos de façade, les grandes messes sont toujours utiles pour leur notoriété ! Le Grenelle fut une mise en scène parfaite pour impacter le monde médiatique. Nous commençons à nous habituer aux mises en scène dramatiques, aux discours sur l’exigence du devoir et à l’engagement éthique affiché avec solennité par le gouvernement Sarkozy.

Comment peut-on parler de développement durable en France quand les institutions politiques et économiques sont affaiblies et les programmes sociaux étouffés ? Dans la vision de l’orthodoxie libérale du gouvernement Sarkozy, l’Etat va perdre ses fonctions sociales et sa liberté d’agir pour le bien être de ses citoyens. M. Fillon collaborateur- Premier Ministre de Sarkozy à déjà définit sa conception d’Etat néo-libéral en parlant récemment de la diminution du rôle de l’état dans les prestations de services publics. L’Etat Entrepreneur de M. Sarkozy va pouvoir agir comme un PDG avec le MEDEF comme partenaire. La franchise médicale pour les pauvres et les cadeaux fiscaux aux riches sont des exemples concrets de sa façon de gouverner pour les riches…. Cet Etat, dans un proche avenir, sera incapable de garantir une intégration politique et sociale fondée sur le droit élémentaire d’accès à une éducation de qualité, un système de santé, des transports public « ecologicament compatible », logements sociaux, et enfin à l’usufruit du bien public.

Une chose positive est toutefois à relever : les jeunes sont très sensibles à la démarche du développement durable et l’opinion publique en France commence à se réveiller. J’espère que les mondes associatif et académique engagés pour un autre développement ne seront pas dupes ! Il ne faut pas baisser les bras face aux beaux discours qui ne se traduiront en rien dans des actions concrètes. Il faut continuer à se mobiliser pour une société équitable, contre la pauvreté et toute autre forme d’exclusion, en refusant les inégalités territoriales, et en exigeant le maintien du rôle de l’Etat pour la garantie de services publics de qualité.
Nous avons tous le droit d’avoir une vie saine, productive, en harmonie avec la nature et socialement équitable. Il faut « penser globalement et agir localement » pour être cohérent avec les principes du développement durable.

MMF
Consultante Internationale
Docteur en Economie